
Le financement du terrorisme et de la criminalité au Sahel : un enjeu géopolitique et sécuritaire
Cet article explore les dynamiques complexes entre la criminalité et le financement du terrorisme au Sahel, en mettant en lumière les trafics qui financent les groupes armés et fragilisent les États. Il analyse également le rôle stratégique de l'Algérie dans la lutte contre ces phénomènes.
GÉOPOLITIQUE


La région sahélienne, vaste étendue reliant l’Atlantique à la mer Rouge, représente aujourd’hui l’un des principaux foyers de criminalité organisée et de financement du terrorisme. Avec des frontières poreuses et une absence d’État de droit dans de nombreuses zones, le Sahel est devenu un carrefour stratégique où trafiquants et groupes terroristes exploitent les faiblesses des gouvernements locaux pour asseoir leur contrôle. Cette convergence entre criminalité et terrorisme, notamment incarnée par des figures comme Mokhtar Belmokhtar, alias "Mister Marlboro", révèle la complexité des dynamiques régionales et leur influence sur les relations internationales.
La criminalité et le terrorisme : une collusion stratégique
Le Sahel est aujourd'hui un véritable "hub" de trafics : drogues, armes, cigarettes, êtres humains, et autres biens illicites transitent par cette région. La question est de savoir si c'est la criminalité qui finance le terrorisme ou si les groupes terroristes facilitent ces trafics en échange d'une part des bénéfices. Les deux activités semblent en réalité s'alimenter mutuellement, créant une synergie néfaste pour la stabilité régionale. La prise d'otages massive sur le site gazier d'In Amenas en Algérie en 2013, orchestrée par Belmokhtar, a montré le lien direct entre terrorisme et financement par des activités criminelles.
La bande sahélienne, reliant huit pays d'Afrique de l'Ouest, est un espace hors de portée des autorités, où les groupes criminels et terroristes peuvent opérer librement. L’étude du Groupe d’action financière (GAFI) a montré que l’absence de mécanismes efficaces de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme favorise cette dynamique. Les trafiquants de drogue, par exemple, utilisent le Sahel comme un passage stratégique pour acheminer des stupéfiants vers l’Europe. La "Highway 10", une route bien connue des trafiquants, est une voie clé pour les cartels sud-américains.
Les trafics dans le Sahel : entre opportunisme et chaos
Les principaux trafics qui alimentent les caisses des groupes criminels et terroristes incluent la drogue, les cigarettes, les êtres humains et les matières premières. Le trafic de drogue, notamment de cocaïne et de méthamphétamine, génère des revenus colossaux. Par exemple, le trafic de cocaïne au Sahel avaient atteint 1,25 milliard de dollars rien en 2012, faisant de cette région un passage obligé entre les producteurs d’Amérique latine et les marchés européens. À cela s’ajoutent les trafics de cigarettes, très lucratifs, et les rançons issues des prises d’otages, qui permettent aux groupes terroristes comme AQMI de financer leurs opérations armées.
Les conséquences géopolitiques de ces trafics sont multiples. D’une part, ils renforcent les capacités des groupes terroristes, permettant à ces derniers de contrôler des portions importantes du territoire sahélien, notamment au Mali, en Libye et au Niger. D’autre part, ils fragilisent les États de la région, incapables de lutter contre ces activités. Cette fragilité attire l’attention des puissances internationales, comme la France, qui était intervenue militairement au Mali en 2013. Cette intervention a eu un faible impact temporaire sur les flux criminels, et la région est restée un terrain fertile pour les groupes armés.
L'Algérie, pivot stratégique dans la lutte contre le terrorisme et la criminalité
L’Algérie joue un rôle clé dans la stabilisation du Sahel. Frontalière de plusieurs zones de conflit, elle est un acteur incontournable dans la lutte contre le terrorisme, tout en étant elle-même victime de ces dynamiques. Le site gazier d’In Amenas a été le théâtre d’une des attaques les plus marquantes de l’histoire récente du terrorisme. L’implication de Belmokhtar, algérien d’origine, met en lumière les défis auxquels l’Algérie est confrontée pour sécuriser ses frontières et préserver sa souveraineté face à des acteurs non-étatiques.
L’Algérie, grâce à sa position géographique et à ses capacités militaires, est perçue comme un rempart contre l’expansion des groupes terroristes vers le nord. Toutefois, elle est également exposée aux tentatives d'influence et aux ingérences étrangères. Les tensions avec le Maroc, notamment autour de la question du Sahara occidental, accentuent l’instabilité régionale. L'Algérie doit donc conjuguer diplomatie régionale et action militaire pour contenir les menaces terroristes et criminelles.
Les implications internationales et les solutions possibles
La criminalité transnationale au Sahel ne peut être combattue efficacement sans une coopération internationale renforcée. Les puissances européennes, tout particulièrement, ont un rôle clé à jouer dans la régulation des flux financiers issus du trafic de drogue et du blanchiment d’argent. Par ailleurs, les organisations internationales comme l’ONU et l’Union africaine doivent intensifier leurs efforts pour renforcer les capacités des États sahéliens à sécuriser leurs frontières et à s’attaquer aux réseaux criminels.
En conclusion, le Sahel demeure une région hautement stratégique où convergent les intérêts des groupes terroristes, des trafiquants et des puissances internationales. L'Algérie, en tant qu'acteur central, est à la croisée des chemins. Sa stabilité et sa capacité à endiguer ces menaces détermineront l’avenir sécuritaire de toute la région.
TRZ




